En rangeant un peu mon bureau (no comment), je suis tombé sur des poèmes oubliés, déchirés, coupés en deux. je tente un peu une expérience en les postant, vous me direz ce que vous en pensez.
les textes datent, je crois
AUX RÊVEUSES AUTOMATES
te voilà petite serveuse
te voilà sur la terrasse de l'avenue, la 112
de la ville-monde
te voilà, un plateau de verres vides
posé sur ta main tremblante
tu regardes passer les gens leurs verres
les cendriers froids les miettes de croissant
et tu penses à leurs journées
remplies, palpitantes, énergiques
te voilà, presque morte, presque en vie
tu rêves, petite serveuse, tu rêves
à l'homme de 7h café crème croissant
journal portable costard un autre crème
tu vois sa journée défiler quand tu le sers
son parfum t'enivre jusqu'à midi presque
alors que ça en vient toutes les minutes
ça parle fort, ça rit fort et ça mange salement
tu ne sais plus où tu te trouves, parfois
seule au milieu des tables nappées
tu es là, presque morte, presque en vie
Livres Rebours Alcool Cercueil
Laids d'Abord Charnel Or
Chemin Vieille Borde- De
Fleurissant Venus Rêves La
Trésor Velours Yeux Terre
Des champs Candeur Défaits Effort
Chantaient Atours Mordent Contre
Printemps Parures Réel Nature
et tout s'essouffle
(sauf si on place la grille aléatoirement)
(calligraphie - géographie poétique)
Aero Ravarmy (brouillons oubliés, hélas)
De l’extinction des mots du monde figés
Immobiles sur les trottoirs des certitudes
S’immolent les paralytiques des fées
Les oiseaux verts des grandes solitudes
Les alcools de goutte et les alcools de chair
Sur les chaussées folles en étalage
Font recette au commerce d’enchères
Qui montent à la mort jusqu’aux nuages
Elévation toujours au bord de l’instant
A posséder un jour pour penser enfin
Voir le moment présent en plein mouvement
Elévation de voyage vers tous les confins
Chaque horizon à visiter pour l’écrire
Les cieux à lister en couleurs et rondeurs
Cotons blancs, grondements noirs du rire
Des anges virevoltant dans l’éther en fleurs
Qui explosent en gerbes de parfums suaves
Formant des rimes comme un jardin fou
Des poèmes de printemps au soleil bavent
Du sucre sonore butiné
Extinction du monde des mots figés
Les mots retrouvent la vitalité du son
Fuite du monde connu, les sons froids
des rouages des roues grinçantes
le cri des enfants effrayés dans les mégaphones bouchés
les fenêtres en feu dans le silence de la ville
le silence de la colère
de voir le vide et en sentir le sang
les stylos ont chuté dans le noir
N’ayant rien appris des erreurs de l’avenir
Tas d’écrivains manqués et de pensées ratées
Déchetterie de pages racornies rassies jaunies
Des pages et des pages en poubelles de mots
Vaste bouche puante de dégueulis littéraire
Les dents gâtées d’avoir trop goûté au tapotis des machines
A souffrir plutôt qu’écrire, à écrire plutôt que vivre
Machines coupables machines incapables
Nous sommes les sauvages, les prédateurs du passé
Les fouilleurs, archéologues, éboueurs, tous abandonnés
Aux dix mille conclusions relançant l’inédit
Les nouveaux mouvements des circuits
Neurones, octets, encre, magie des rêves
Nous sommes les grands sauvages, croqueurs de vie
Nous vivrons sans règles, sans lois, sans trêve
Loin des métaux précieux de la poésie qui aboient
Groupe de chiens débiles jurant à la postérité
Que tout sera bon et que rien ne sera fait
Nous, soldats brutaux, véritables fous à nier
Formons un tendre renouveau, une encre sympathique
Formation invisible dans l’amas de cristal
Des serpents de diamant agitent le bâton mental
Qui conduit tout le monde sur la place de grève
Pour l’exécution du peuple où le peuple zappe à la chaîne.
Il y a une urgence d’absolu, sonnée par les fanfares
Des forçats, les buveurs d’alcools stellaires
Les monstres humains qui remuent n’intéressent plus
La réalité va manger ailleurs, dans la vie retrouvée
Les nuages s’allongent dans une verticalité
Forment des prairies où paissent les poètes
Herbes folles, ruisseaux secrets, lacs et cascades
Les nuages forment une forêt de bois blancs
Erubescence de l’éruption de vivre
Contemplessence jamais terminée
La lune rouge rosit à l'aurore du soir
Serait-elle l'envers de l'astre du jour
Ou l'envers de nos rêves réels ?
La face de nos yeux à vendre.
De cette ville, elle en a l’air, elle en a l’âme.
MIMICRY (Olympe assassinée)
(celui là date vraiment)
Dans le temple en ruine
les dieux hurlaient aux humains en prière
une complainte de fin du monde
Arès est parti à l'assaut de la terre
donnant des ordres insensés à des soldats fanatiques
ses clairons annonçaient
la débâcle aux peuples fatigués
qui prenaient leurs armes sans espoir
autre que la mort, la chaos et le soleil
l'astre infini comme seule gloire
Vêtue une robe déchirée, Aphrodite
jouissait vers quiconque
aurait une pièce ou deux pour la payer
contre de l'amour, et vrai, et pur
La vénus vérolée criait au plaisir des peuples
le plaisir par dessus tout
pour oublier les morts, le sang
elle s'en allait, vêtue d'étoiles
à qui voudrait d'une pute pleureuse
aux atouts sans cesse
mouillés par la crasse immense de l'homme
Séléné, la tendre et blanche
parcourait les forêts en forçant la vie
elle disait aux âmes de la nuit
ne pleurez pas, car je me meurs
et l'orchestre mondain
jouait sa dernière mélodie
parmi les arbres allant à l'adolescent
traquant le pur, le vierge, le tout blanc
Séléné courait d'une ivresse, pendant
que tous les jeunes,sur la terre
mouraient d'un manque, faisant semblant
Dans sa forge de forcenés abrutis
Le grand patron, de sa laideur
faisait souffler sa forge de malheur
il armait ses fidèles dans un dernier chant
criant un chant d'éternité
dans la chaleur et dans le bruit
la lumière éclairait son visage horrible
tandis qu'il maudissait l'humanité horrible
d'être plus respectable que lui
alors il se jeta dans son propre feu
celui qu'il avait créé de ses mains
voulant des lendemains, sur la montagne
plus plaisants, plus gais, plus humains
il soufflait de son visage laid
des souffles d'espérance sans chemin
Qu'empruntait Apollon, encore
beau et fier comme une sculpture
de Rodin, ou d'un sculpteur inconnu
l'astre de jour fuyait sous les flots
sachant qu'ensuite il ferait jour
et que sa lyre jouerait encore
pour des messagers sans message
de ceux qui croient en donner
en se perdant dans Séléné
Face aux humains, Dionysos
abandonné par son cortège
de nymphes, de satyres, de dryades
buvait une dernière rasade
contre des piliers de temples oubliés
il jurait et apostrophait
des vieillards et des aveugles
se cognant contre les murs
il perdait sa nature
insultait ses fidèles
tout ceux qui le priaient
il leur jetait du vin aigre, des orties
et partit seul, titubant
vers la route oubliée, vers l'infini
Les mers engloutirent sans pitié
Poséidon dans un ouragan
sous la mer, les poissons
firent un festin de fête
leur Dieu avait coulé
en laissant son trident doré
depuis, le sel est son sang
et sa colère éternelle fait des flots
qui se brisent en guillotine
sur les plages traversées
L'épouse fidèle, telle était Junon
qui se riait de l'opéra fabuleux
Les humaines aux avantageux
cercles de jouissance sans fin
périssaient au plus nombreux
sans bagues et sans robe
le Dieu n'était qu'à elle
la vieille et triste éternelle
Zeus entendait ce rire
jusque dans sa chair divine
Il fuyait sans voir au loin
les troupeaux des femelles avides
elles réclamaient son sang, son sperme
voulaient de son épiderme
contre leurs peaux douces de vierges
il fuyait en pensant de rage
ce monde est fou
je le quitte plein orage
Ainsi soit-il
Dans le temple en ruine
les dieux hurlaient aux humains en prière
une complainte de fin du monde
pas folichon, mais de mon souvenir, je l'ai eu en "direct live" durant une visite au Portugal, les vers venant en alexandrins comme une inondation cérébrale. Peu après, sur le trajet du retour, j'ai essayé de retrouver ces visions, mais peine perdue, ça ne rend pas du tout;