Merci Mario ! J'essaie de rajouter une structure un peu plus épaisse, mais ce n'est pas réellement mon habitude, je ne veux pas dire les choses...mais j'essaie !
voilà une nouvelle étape, il reste un gros travail à faire mais bon... :
Désormais que je sais tout...
(J'ai vécu 17 ans de perte...17 ans sans ma mort. Et puis je l'ai retrouvée, dans une manche pleine de tricheries. Ma mort. Voilà la dernière carte qu'il manquait à mon jeu de 17 ans : ma naissance posthume).
Désormais que je sais tout,
Je peux tout mourir aussi...tout de votre manière d'apprivoisés, de votre démarche d'éduqués, je peux tout connaître de cela. Et le ranger dans mon meurtre. Je sais ce que vivre veut dire parce que j'ai quitté son estomac. J'ai quitté sa famine de verbes, ses actes décoiffés et sa gorge sèche. Vivre est un suicidé trop rapide désormais, et il m'aura fallut naître ailleurs qu'en son geste maladroit. Il m'aura fallut même déchirer ses grands yeux pleins du jour pour agraffer à mon âme deux morceaux du chaos. Oui j'ai le regard en vrac lorsqu'il est mort. Seulement voilà la coupe que je me suis faite, instable, voilà la fièvre que je me suis passée sur les doigts pour en avoir d'écrivains, la phalange en sueur et des orages pleins les ongles.
Désormais,
Je suis mort.
Et je suis mort bien plus longtemps que j'ai vécu, parce que l'instant ne m'intéresse plus : je le sais, cet instant d'équilibre, et je le renie. Mieux peut-être, je le hais.
HAÏR
Désormais que je sais tout,
Je porte dedans mon ventre le stérile de mon acte ;
enfant-meurtre.
Dedans ma bouche la grossesse de ma haine.
Ma langue du désastre ; accouchement ; H.
Je tiens
dans ma poitrine un temps
de vitrail ; temps de lumières et
de couleurs ;
de toi. C'est dans une
cathédrale brutale
que je t'aime - La crucifixion
au coin de
l'œil, déjà - jusqu'à l'autel ;
ce temps de carreaux brisés
que je tiens ; mon martyr ; j'avance.
Jusqu'à la croix - au miroir assoiffé,
à la neige mutilé... -
Temps d'oubli.
J'ai communié à tout le concret
de ton mirage ; manque.
J'ai appris à avoir
mes cernes
pour buvards ; papier-larmes ;
à y éponger la nuit. Sous mes yeux
se cache la paume du poète.
HAÏR
L'infinitif qui
habille mes étoiles. - avortement
céleste -
J'ai couru cette langue, peinte
de cendres ;
mémoires du feu ;
avant d'haïr tout à fait...
H. désormais je te hais comme
les autres ; les odeurs de pierres ;
jumelles du vertige.
"Mon homicide est fendu de quatre lettres"
HAÏR
Il m'aura fallut le dire, je l'ai dit :
"Je t'ai entendue la deuxième fois beaucoup plus lourde que la première, comme toutes les fois après elle. Comme si le temps finissait toujours par s'entasser dans ta gorge. Elle était lourde ta voix, pleine de tes passés, couchée là, dans cette seconde fois."
C'était sûrement trop simple...trop le crépuscule dans ma gorge pour entendre ton mot. J'ai connu des enfants comme toi pour qui la rosée ne comptait pas. Pour qui seule la sueur du lendemain de notre vie ne comptait. J'ai appris avec elles à mordre la soie des années, à laisser se rompre les rumeur de mes mains sur les draps du temps...j'ai appris, j'ai appris grâce à elles, à ces comme toi, à crier plus fort que le ciel, à aimer mourir avant d'aimer vivre : je suis poète, mauvais certes oui, mais poète tout de même.
Il m'aura fallu le plus parfait, le plus aveugle miroir du réel ; me tenir au balcon de ton langage ; instant. Je m'en rappelle si beau, si instable, - ma naïveté chérie - le reflet brûlant d'un avortement plein la lèvre. Je me suis coincé il y a si longtemps un morceau de définitif dans le ventre, déjà 17 ans des ces grands yeux salés, de tout ce désordre de chair...voilà la haine que je ne veux pas digérer, la mort que je veux écrire dans les recoins capricieux de ma nuit. Haïr. Embuer la vitre de mon âme de toute cette haine, de toutes ces fleurs sensibles qui brulent derrière les étoiles, en avoir des épines pleins les yeux. "Ma rage est un rosier incandescent." Voilà ce que prononce la main du poète et ce qui prend vit dans mon ventre. Vous avez dans le votre le fantasme : l'illusion, c'est la définition que vous portez sous vos poitrines sèches, le lierre affamé qui s'y loge ; votre dictionnaire suicidé - ou fier, c'est pareil. Le mien connait la marée, fait passer dans mes veines l'écume du concret. Ce regard d'aubépine, je le connais, je le souffre. Et c'est sa morsure au goût d'écorce, sa sève plein l'estomac que je vous hais.
HAÏR
- Voilà au monde ce que je porte, comme à H. désormais.
Désormais que je sais tout,
tout de cela, de son cœur de tragédie grecque, de ses doigts de comptable. De ses yeux qui peut-être ont vu naître Rimbaud, Dostojevski et Céline, mais qui n'ont jamais su en trembler comme il faut. Moi pour être comme il faut je l'oublie : "Parce que je n'ai cessé, depuis que je t'oublie, de naître : la fin plein le poumon." - Pour être comme il faut j'ai dû naître à ma fin. - Mauvaise actrice, elle l'était, jamais je n'ai vu son maquillage trembler, jamais je n'ai vu se briser sous son front un regard fragile...jamais. Pour être comme il faut je l'ai lu, chaque sois, je l'ai laissé écrire au dos de mes paupières : ce qu'il y a de venin dans les nuits de sa plume, je veux le porter à mes ongles froids, glisser la pointe de ses mots sous les buées timides de ma main...il s'en est passé des étoiles dans mon lit...et sûrement qu'à cet instant de toute la peur d'un départ je verrai encore leur salive frénétique m'éclairer, toute cette rosée passée dedans mes bras, je l'aurai à mon côté d'adieu, le corps vieilli par leurs phrasés, l'âme tremblante, mal coupée, là...là...tout au bout de la jeunesse. Mort. Je mourrai, parce qu'il faut tous y aller se coucher, oui, je mourrai, terriblement, avec à mes côtés le dernier rire de mes amantes célestes. Et j'entendrai une dernière fois le chaos de leurs gorges : "bonne nuit, vieillesse décoiffée - bonne nuit, jeunesse aux cheveux gris."
(...)
On est tous sans doute une ébauche à cet instant béni, cette seconde instable où l'on regarde en arrière...avec pour seul sourire la faiblesse des mots... La mort ne fait que se prononcer. S'approcher. Mais pour "l'être", là, il faut n'avoir les traits que d'un croquis...même pas d'un bon artiste. La chute se dessine d'un épuisement, d'un soupir au coin de la lèvre qui s'étire vers le rouge du ciel, vers le maquillage douloureux du crépuscule. Cette nuit le soleil part vendre son corps, et je l'accompagnerai de mon dernier mot prononcer aux flancs bleus de sa vertu : mon adieu ne se dit bien qu'en plein jour.
(...)
"La mort ne fait que se prononcer."
Mais au moins se prononce-t-elle tout à fait :
HAÏR