I
Je n’avais eu qu’un seul souhait
- Ne rien faire
et sentir pleinement, avec toute la disposition de mon être
les nouvelles lois de ma demeure
L’effacement et la contemplation
Cette image du marginal
comme un sacrifice des connaissances
Le premier pas du suicidé vers la brise sans fin
Je voulais vivre en bête
dans la tranquillité close de la nature
où je n’aurais plus à donner ni à recevoir
Quitter l’ennui du confort
La première maison en pierres qu’a construit l’ancêtre
alors que l’on ne connaissait de la transparence du monde
que le soupçon du soleil
jour après jour
la nuit
quand elle laissait encore ses trous béants
sur les murs de la ville
et suscitait le fourmillement permanent
des créatures sauvages et croyantes
parmi les bougies
il y avait l’innocence
dû aux frayeurs, du temps qui éclot d’une goutte d’eau sur la feuille de rose
et les murmures des mères qui ne demandent qu’au pardon
d’éternels enfants
pour aimer
encore
La douceur des choses simples
jusque dans l’erreur
II
Le monde peut bien changer
et mon dos s’arrondir
sous le cours d’eau de la rivière
comme une épine fine et dolore
Prête à se mouler aux plis
des battements
Ne cesserais-je pour autant
d’être à l’image de ma pensée ?
Ô vanité où partout l’œil humain regarde
la portée de sa main éternelle comme sort
Je voulais me métamorphoser
en ces pierres équilibristes
que la nature a faite comme sage
Ces troncs découpés comme œuvre du temps
que la mémoire, galopant dans les courants d’air de la forêt
reconnaît en visage
Vanité même dans la décision d’être chanté
par le clapotis des chutes
et d'abeilles butineuses
l'amour pensé de oisiveté
alors que l'odeur frais des feuillages révoque sans cesse
celle de l'hygiène
Est venu la nature fragile, par fragment de roches et de sols,
après des années d'attente et de supplications
se ficher enfin dans la dépouille de l'homme
la solitude que l'on entend parler
- comment prétendre à notre vie